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Uber Dans les pas des Google, Amazon, Facebook et Apple

Les carnets noirs de l’évasion fiscale 20/34. Les géants de l’internet sont connus pour leur recours aux paradis fiscaux, mais, chez ces multinationales, l’évitement de l’impôt est plus la règle que l’exception. Le scandale des Panama Papers puis celui des Paradise Papers nous l’ont rappelé.

Uber fait-elle partie de ces nombreuses firmes transnationales (FTN) qui s’enrichissent en trichant ? Pas vraiment, et c’est là tout le problème. Le droit est, disons, complice. La plupart de ces entreprises transnationales pratiquent à l’envi « l’optimisation fiscale », qui n’est pas illégale à proprement parler. Cela prouve assez le manque de volonté politique de certains États, dont la France, pour lutter sérieusement contre ce fléau plus connu sous le nom d’évasion fiscale.

Qui est Uber, si répandue dans les rues de nos villes ? Uber est une plateforme technologique américaine créée en 2009. Elle met en relation passagers et voitures de transport avec chauffeur (VTC). Elle s’est rapidement exportée à travers le monde et opère à Paris depuis 2012. Uber est devenue l’entreprise phare, l’emblème même, de la société mondialisée, un acteur majeur de l’économie freelance. Beaucoup d’économistes et de responsables politiques n’hésitent plus à parler d’« ubérisation » de l’économie. Uber est d’abord et surtout le symbole du travail précaire et de l’évasion fiscale.
un chiffre d’affaires de 2 milliards de dollars environ en 2015

D’après le calcul réalisé par le Canard enchaîné, 27 000 chauffeurs Uber roulent en France et réalisent, en moyenne, 60 000 euros de chiffre d’affaires annuel. Sur le nombre incalculable de trajets effectués par ses chauffeurs, Uber touche 400 millions de commissions par an. À l’échelle mondiale, le montant des courses perçues par les chauffeurs d’Uber atteint 10,84 milliards (la Tribune) de dollars en 2015. Soit, pour l’entreprise, un chiffre d’affaires de 2 milliards environ, perçu via les 20 % de commission qu’elle s’octroie sur chaque course.

Le système d’optimisation fiscale d’Uber n’est pas différent de celui adopté par les grandes multinationales de la high-tech (type Gafa). En mai 2013, le géant américain a créé Uber International CV, domiciliée aux Pays-Bas mais dont le siège correspond à l’adresse d’un cabinet d’avocats dans les Bermudes. Cette société n’emploie aucun salarié tout en restant à la tête d’un réseau complexe de filiales basées hors des États-Unis.

Pour parfaire ce montage financier, la filiale Uber International CV a conclu des accords avec sa société mère, Uber Technologies Inc, dont le siège social se trouve quant à lui à San Francisco. La seconde filiale clé du système, baptisée Uber BV, compterait 48 salariés et se trouve également domiciliée… aux Pays-Bas. Le revenu généré par une course (quel que soit le pays) est envoyé à Uber BV, qui reverse 80 % du montant de ladite course au chauffeur – qui, lui, payera des impôts dessus – via une autre société écran nommée Rasier Operations BV. Sur les 20 % restants, seulement 1 % des revenus est déclaré et taxé à hauteur de 25 %. Le reste est partagé entre les filiales locales (comme Uber France) et Uber International CV. Cette dernière reverse 1,45 % de royalties à Uber Technologie Inc, qui seront taxés aux États-Unis. Une grande partie des 20 % qui ne vont pas au chauffeur échappe donc librement à l’impôt.

Les Pays-Bas sont classés comme le troisième « pire paradis fiscal » par l’ONG Oxfam, derrière les Bermudes et les îles Caïmans. Il s’agit du paradis fiscal préféré des entreprises européennes. Selon Oxfam toujours, l’évasion fiscale des multinationales coûte au moins 100 milliards de dollars par an, autant d’argent qui ne profite pas aux pays pauvres, à la lutte contre les injustices et les inégalités. Le sociologue Pierre Bourdieu nous avait pourtant avertis : « Le néolibéralisme reprend les plus vieilles idées du patronat, sous un message chic et moderne. C’est une “révolution” conservatrice qui veut imposer un retour à une forme de capitalisme sauvage et cynique, qui organise l’insécurité et la précarité, qui se réclame du progrès mais qui glorifie l’archaïque loi du plus fort. »

lundi Dominique Tian, le gentleman fraudeur.

le guide touristique de la fraude.

SAINTE-LUCIE

Sainte-Lucie est un petit État insulaire situé dans la mer des Caraïbes, au sud de la Martinique. Le pays est membre de la Communauté caribéenne et utilise le dollar des Caraïbes orientales comme monnaie légale. L’île a été tour à tour gouvernée par les Anglais et les Français jusqu’en 1814, puis les Britanniques en ont pris définitivement le contrôle. En 1979, Sainte-Lucie est devenue un État indépendant du Commonwealth associé au Royaume-Uni. Sainte-Lucie propose des garanties très importantes en termes d’anonymat et de confidentialité. La loi sur les sociétés commerciales internationales assure la confidentialité aux actionnaires, administrateurs et dirigeants. La société International Business Company (IBC) incorporée à Sainte-Lucie est populaire car elle offre un double avantage : la confidentialité et l’anonymat du client, sans exigences d’audit ou de rapports. Le gouvernement propose en outre de faibles taux annuels et des possibilités flexibles d’organisation des entreprises. En 2017, l’Union européenne a adopté une liste noire de 17 paradis fiscaux incluant Sainte-Lucie. En mars 2018, trois pays initialement sur la liste noire en sont retirés : Bahreïn, les îles Marshall et Sainte-Lucie. Ils ont basculé dans la liste grise des pays ayant pris des engagements de bonne conduite en matière fiscale, font et feront l’objet d’un suivi.

Xavier Derrac

Article publié le 10 août 2018.


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