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Livraisons massives d’armes en Ukraine et réarmement en Europe : les profiteurs de guerre à la manœuvre !

De nos camarades "unité CGT"

Les médias occidentaux rapportent des « avancées » de l’armée ukrainienne - équipée, financée, soutenue financièrement mais aussi en termes de renseignements militaires par l’Union européenne, l’OTAN et les Etats-Unis. Cette escalade s’explique par au moins deux facteurs, d’une part la « l’autolimitation » de la puissance de feu russe, ainsi que par l’intensification des livraisons d’armes occidentale, notamment d’armes lourdes.

En dépit des mises en garde répétées par la Russie, les dirigeants des pays membres de l’Union accentuent leur soutien financier et militaire en direction du gouvernement ukrainien. Lors de son discours annuel du 14 septembre devant le Parlement européen, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, avait insisté sur le fait que « l’heure [était] à la détermination, pas à l’apaisement », illustrant d’une manière éclatante la pente guerrière sur laquelle s’engagent les 27 Etats membres de l’Union européenne. Evoquant la « guerre contre notre sécurité énergétique, contre notre économie, contre nos valeurs […] contre notre avenir », une « guerre de l’autocratie contre la démocratie », von der Leyer a multiplié les références bellicistes et s’est félicitée de la poursuite de la guerre impérialiste en Europe.

En février dernier, le début du conflit avait été pour l’Union européenne l’occasion de se tourner résolument vers une politique de financement militaire de grande envergure. Prétextant la « défense existentielle » face à la Russie, l’UE s’est alors dotée d’une enveloppe de 5 milliards d’euros, par le biais de son nouvel instrument financier datant de mars 2021, la « facilité européenne pour la paix » (sic), censée couvrir toutes ses actions extérieures ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense et relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).

Une telle enveloppe, d’un montant inédit, visait à rembourser les industriels de l’armement et les Etats membres (parmi lesquels l’Allemagne, la France, la République tchèque, la Roumanie, le Portugal ou encore la Grèce) qui avaient déjà livré de l’armement à Kiev, tout en incitant d’autres à le faire.

Réarmements tous azimuts en Europe

Dans le même temps, l’Allemagne a pu augmenter de manière colossale ses dépenses militaires pour les années à venir, en débloquant une enveloppe de 100 milliards d’euros consacrée à la modernisation de son armée, dépassant le seuil de 2% du PIB exigé par l’OTAN pour les dépenses de défense. A l’occasion de la guerre en Ukraine, l’Allemagne ravive ses ambitions de superpuissance militaire, prête à jouer un rôle de premier plan dans le nouveau partage du monde. Dans un discours-programme sur la stratégie de sécurité nationale de l’Allemagne, la ministre de la Défense Christine Lambrecht, issue du SPD, a dit considérer les forces allemandes comme prêtes à « soulager l’Amérique en Europe » : les Etats-Unis étant appelés à se tourner vers le Pacifique, ils laisseront le champ libre à la prédominance militaire allemande sur le sol européen.

L’intensification de l’aide militaire à l’Ukraine apparait comme une aubaine dont il convient de profiter. Alors que la classe politique et médiatique allemandes rivalisent d’ardeur dans ce concert militariste, les Verts font montre d’une agressivité toute particulière. Anton Hofreiter, co-président du groupe d’Alliance 90/Les Verts au Bundestag, est allé jusqu’à exiger la livraison à l’Ukraine de chars de combats modernes et occidentaux, en référence aux chars de combat Leopard-2 réclamés depuis longtemps par Kiev.

Comme par le passé, la politique de guerre et d’austérité exige la militarisation de la société à l’intérieur et la criminalisation de tout mouvement de résistance de la classe laborieuse. Pour rappel, le lundi 13 juin 2022, Emmanuel Macron avait profité de l’inauguration du salon international de défense Eurosatory à Villepinte pour annoncer que la France « [était] rentré dans une économie de guerre dans laquelle […] nous allons durablement nous organiser. »

En juin, on estimait que depuis le début de la guerre les institutions de l’Union européennes avaient participé à la hauteur d’environ 2,5 milliards d’euros aux financements exclusivement militaires (livraison de munitions, d’armes, d’avions de combats, de blindés, de drones, formations dispensées). Ces dépenses consacrées à l’aide militaire ont considérablement augmenté depuis, même s’il est pour l’heure difficile de les quantifier de manière précise. Un montant considérable, même s’il reste toujours inférieur à l’appui financier états-unien du programme de financement Ukraine Security Assistance Initiative, estimé quant à lui à 25 milliards.

De leurs côtés, les Etats membres de l’Union européenne multiplient l’intensité de leur engagement dans les livraisons, allant jusqu’à prélever dans le stock de leur équipement national, afin de garantir une livraison rapide et de ne pas avoir à subir les délais de production. Josep Borrel, chef de la diplomatie européenne, a annoncé que l’aide fournie à Kiev par les Etats membres depuis le début de la guerre était tel que les réserves des pays membres en étaient sérieusement affectées. Fin août, le gouvernement allemand, par l’intermédiaire de sa ministre de la Défense, est allé jusqu’à déclarer qu’il était « en train d’atteindre les limites » de ce qu’il pouvait livrer

Ainsi, la participation de l’Allemagne à l’aide strictement militaire s’élèverait à la hauteur de 1,2 milliard, et celui de la France à 233 millions. La Pologne, qui assure le rôle de plate-forme logistique en vue de l’acheminement des livraisons vers le territoire ukrainien, participerait à l’aide militaire à la hauteur de 1,8 milliard. A l’échelle de l’Union européenne, les Etats membres qui sont dans le voisinage de l’Ukraine sont les pays qui ont le plus contribué à cette aide, proportionnellement à leur PIB. Ainsi, l’Estonie avait apporté à Kiev l’équivalent de 0,83 % de son PIB en aide bilatérale, contre 0,08 % pour de plus grandes économies comme l’Allemagne (ou bien 0,04 % pour la France).

Dans ce contexte d’escalade, certains plaident pour l’augmentation substantielle des livraisons, prétextant la nécessité d’un alignement sur l’intensité du soutien des Etats-Unis et du Royaume-Uni (qui participe à la hauteur de 4 milliards). C’est le cas, on l’a vu en Allemagne, mais également en France. Le type d’argumentaire en dit d’ailleurs long sur les intentions de ces belles âmes : Pierre Haroche, chercheur en sécurité européenne à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire, insiste dans un article du Monde daté du 21 septembre (« En Ukraine, un geste fort pourrait être de livrer des chars Leclerc") sur la formidable couverture publicitaire qu’un soutien accentué de la France pourrait représenter.

En s’alignant sur un tel financement militaire tous azimuts, la France verrait ses positions renforcées au sein de la « construction européenne » : « Dans ces conditions, augmenter significativement les livraisons d’armes françaises enverrait un signal politique fort et pourrait donc donner un nouveau souffle aux projets européens portés par la France ». Bien plus, l’Ukraine étant appelée à devenir « l’une des plus puissantes armées de terre en Europe », dirigée durablement contre la Russie, « [elle] deviendra alors un acheteur d’armes incontournable et se tournera naturellement vers les équipements que ses soldats connaissent et ont déjà éprouvés au combat. En livrant des armes, ou en formant 10.000 soldats ukrainiens, comme le font les Britanniques, nos alliés préparent aussi discrètement leurs exportations de demain. Il serait regrettable que les technologies françaises ne soient pas à ce rendez-vous. » La philanthropie à peine déguisé laisse alors place à la réclame la plus vulgaire qui soit, à l’adresse des grands groupes français de l’armement : « D’un point de vue industriel, enfin, même en adoptant une vision étroitement nationale des intérêts français, les livraisons d’armes à l’Ukraine pourraient être envisagées comme un investissement rentable. A court terme, l’exposition médiatique des armes qui permettent aux Ukrainiens de tenir tête aux Russes constitue une publicité sans équivalent, qui ouvre des perspectives d’exportation nouvelles. Depuis leur emploi en Ukraine, les canons Caesar ont déjà suscité l’intérêt des armées lituanienne et espagnole. »

DANS LA FORCE DE LA LUTTE ORGANISÉE SE TROUVENT L’ESPOIR ET LA PERSPECTIVE

Rien de toute cette escalade ne vise à la paix. L’opposition totale à la guerre en Ukraine reste pour le mouvement syndical de classe le seul chemin, la seule position en faveur de la vie, de la paix, des libertés, la satisfaction des besoins, et du progrès social. Cette opposition passe aussi par la dénonciation du complexe militaro-industriel et les fauteurs de guerre qui souhaitent avant tout le renforcement de leurs positions au sein des grandes oppositions inter-impérialistes de notre temps, et l’espoir des bénéfices juteux en provenance du marché de l’armement.

Dans un communiqué confédéral, la CGT a cité la position de Lénine, « La classe ouvrière, face à une guerre réactionnaire et impérialiste conduite par son gouvernement, ne peut souhaiter d’autre issue que la défaite de son gouvernement. ». Dont acte, imposons la fin de l’ingérence française en Europe de l’Est. Imposons la fin des livraisons d’armes et le soutien à un gouvernement criminel.

Nous affirmons que la sortie de l’OTAN, et la rupture avec l’UE, sont une nécessité vitale pour notre peuple, afin d’éviter notamment d’être entrainés « automatiquement » dans une guerre mondiale d’une intensité dont nous ne pouvons même pas avoir idée.

Pas un euro, pas une arme, pas un soldat pour la guerre impérialiste ! Sortons de l’OTAN !

Article publié le 24 octobre 2022.


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